Il y a dans toute vie, des étapes de doute, d'angoisse, voire de désespoir. Et tragiquement, ces périodes sont, bon gré malgré, à vivre, à éprouver, à traverser. Ne pas s'enfuir dans
l'oubli, la distraction ou l'insouciance mais douloureusement se soucier de ces incertitudes, les lire dans le quotidien, les écouter dans le creux du soir. La confrontation au monde
souterrain nous apparaît comme un moment nécessaire pour que se manifeste l'être en devenir, en son entier.
Nécessité de descendre aux profondeurs de la vie, une plongée essentielle à toute initiation. S'attacher à cet abîme noir, celui de l'animalité sommeillant
en nous, celui du plaisir et du désir, toutes ces petites choses obscures qui ne manquent pas de nous fasciner mais que bien souvent nous évinçons et que nous ne tolérons que dans les
contes et histoires fabuleuses. Alors nous faisons la rencontre fascinante et quelque peu effrayante de l'autre, ombre évanescente. Avoir le courage et la
force de s'entretenir avec elle, de faire sa connaissance dans l'intimité de son corps, d'expérimenter le trou noir… et puis toucher à l'essentiel,
recevoir ce que l'on garde enfermé en soi.
Le dialogue échangé avec cette ombre furtive est un merveilleux moyen de savoir si l'on vit dans l'amour ou pas. L'ouverture du coeur à son existence cachée conduit à une meilleure
connaissance de soi-même. Ces moments fragiles et délicats de mutation intérieure permettent de découvrir de nouvelles possibilités jusque là insoupçonnées. Cette prise de conscience
n'enlève pas les doutes ou les difficultés mais pousse à les accepter avec douceur. C'est un travail exigeant que d'être compatissant avec soi-même qui finalement s'édifie au long de la
vie avec ses heures agonisantes et ses jours apaisants. On sait avec le temps qu'il faudra toujours faire avec cette part d'ombre et s'en accommoder dans un équilibre conflictuel, une
tension permanente, une relation intime.
C.C. 11/2005
Prolongement :
- Xavier Thévenot, Avance en eau profonde !, 1997
- Jean Monbourquette, Apprivoiser son ombre, 2003
- Michel Maffesoli, la part du diable, précis de subversion postmoderne, 2004
- Luc Besson, le grand bleu, 1988
